lundi 27 décembre 2010

Quand Abdelatif Kechiche s'en mêle.

1. Cette actrice est formidable.



Pour le reste, c'est une autre histoire. Une grande question sur une multitude de choses, un grand fouillis de pensées tortueuses. Une vision d'horreur et de magnificence, un film réussi malheureusement.





Voilà donc que l'on décide un dimanche soir de s'engager dans un chemin bien difficile dans notre salle de cinéma préférée de l'année. Voilà donc que nous bravons le froid, les copains et moi-même pour se rendre compte du poids de ce film que j'avais proposé d'aller voir, parce-que ça semblait intéressant.
Intéressant. Ce mot comme un préjugé, un a priori bien faible, compte tenue, après coup, de l'immensité de ce film d'Abdelatif Kechiche. Évidemment, en bon cinéphile qui se respecte, on a vu à coup sûr L'Esquive ( qui a révélé Sarah Forestier ) et La Graine et le Mulet ( qui a révélé Hafsia Herzi, décidément ). En bon cinéphile qui se respecte, donc, on sait un tantinet à quoi s'attendre avec Kechiche, et pour ma part, j'ai peur de la longueur étant donné l'ennui certain ressenti en visionnant son dernier long métrage.
Ainsi, en ce dimanche, je ne m'attends aucunement à du divertissement lorsque la salle s'obscurcit, mais à un vrai bon secoueur de méninges.
Sauf qu'on ne peut pas caractériser ce film par le qualificatif "intéressant" de ma premiere idée. On ne peut pas, parce-que c'est nettement plus que ça, et ça n'est, en aucun cas INTÉRESSANT. Ca n'est pas intéressant parce-que c'est odieux, malsain, gênant, interrogateur. Je ne crois pas que Kechiche se soit simplement contenté de montrer les fait, je crois qu'il a pointé du doigt une société à l'époque où elle prônait les droits de l'homme dans l'habit le plus pourri qui soit : dans le simple appareil de l'inhumanité, de la barbarie presque.
Vénus Noire montre, deux heures trois-quart durant, le destin d'une femme ( hottentote ), objet de toutes les convoitises par la bourgeoisie du XIXe du fait de la particularité de son sexe, notamment. Condamnée d'abord à jouer les sauvages, comme un animal que l'on aurait éduqué un tant soit peu, pour les besoin d'un forain avide de bénéfices, puis vendue, achetée, comme un objet. Louée également, pour la science qui n'a vu en elle qu'un singe. Prostituée, enfin, pour sa propre survie. Une tentative de vivre qui lui sera fatale.
Le génie de Kechiche réside dans le malaise du spectateur face à la cruauté de la société dont il est l'héritier, mais également dans la charge émotionnelle d'une puissance rare qu'il évoque en chacun de nous. Je me prosterne donc face à un réalisateur dont je reconnais désormais la grandeur : ce film terrible est pourtant profondément réussi, ce qui est à la fois tragique et fabuleux dans le sens où il permet une réelle prise de conscience dans le poids des actes causés à cette femme, victime des ses rêves d'Europe et de la triste réalité qu'elle découvre et contre laquelle elle ne peut réellement se battre
Vénus Noire, d'Abdelatif Kechiche.  //


Mieux vaut tard que jamais.

/
/
/
Je fais rarement l'éloge d'un film sans y trouver un défaut quelconque qui puisse lui nuire et atténuer un peu toutes les qualités que je lui ai accordé. Aujourd'hui pourtant, il se pourrait que ma critique, quelle soit fine ou baclée, n'en finisse plus d'enthousiasme quant au film dont je vais parler : 

Bright Star, de Jane Campion.









Certes vous ne faîtes que lire ces mots sur un écran d'ordinateur, cependant, si vous voyiez mes yeux, il se pourrait que vous déceliez aisément l'éclat brillant qu'ils peuvent prendre lorsque je parle du dernier film de Jane Campion.
L'histoire n'est rien d'autre que le développement d'un amour fusionnel entre un poète et sa voisine qui doivent braver les conventions sociales et laisser évoluer leur bonheur quoiqu'il en coûte au milieux des mots d'amour écrits à l'encre noire par des mains passionnées.
Une histoire finalement presque banale, contemporaine à celle d'Orgueil & Préjugés à la différence qu'elle n'est pas fiction mais réalité et que le film est sans aucun doute d'une qualité bien supérieure.

Jane Campion maîtrise encore une fois l'art de mettre en image les sentiments, de les faire vivre pleinement dans l'esprit de chaque être qui regarde, non plus en tant que spectateur mais avec une enivrante impression d'être acteur de cette histoire, de s'impliquer dans l'aboutissement du bonheur de deux êtres qui sont indubitablement fait pour être réunis. Ce film est une succession insensée de tableaux - car oui, chaque plan est une fantastique composition - dont les couleurs pastels s'accordent parfaitement avec la musique de Mark Bradshaw pour laisser émaner tous les parfums des premières histoires d'amour; l'espoir, les doutes, l'exaltation, le désir, la passion, ... Les images de Jane Campion sont la volupté même, la douceur également. Certes on aurait tendance à croire combien ce genre de récit peut être lourd de niaiserie, de tulle rose et de promesses de mariage menant irrémédiablement à une fin heureuse et méritée. Ce n'est pas le cas. Toute cette douceur ne fait qu'atténuer les aboutissants tragiques de l'histoire de John Keats et Fanny Brawn. L'implication du spectateur n'en sera que grandissante à mesure que la diégèse se poursuit car la beauté de ce film ne réside en somme que dans la pureté de ces deux amants, l'une fille de bonne famille qui n'a peur ni des mots, ni de l'avis des autres, qui ose, qui coud et ne voudra rien de plus que l'amour d'un poète sans un sou et pourtant de talent.



Il m'est impossible de dire du mal de tant de poésie réunie dans deux heures de cette magie époustouflante que nous fait vivre Jane Campion à travers les moindres détails de son film. J'ai bien peur d'être exaltée par un travail formidable, qui je le répète souligne toute la volupté de l'âme humaine qui semble ne plus exister de nos jours. Et cette volupté est parfaitement menée par deux comédiens étonnants : Abbie Cornish ( Candy ) et Ben Whishaw ( Le Parfum ).





Je rêve que nous sommes des papillons
n'ayant à vivre que trois jours d'été.
Avec vous, ces trois jours seraient plus plaisants
que cinquante années d'une vie ordinaire.

//